Les enfants sont dits intellectuellement précoces ou à haut potentiel lorsque le QI mesuré par des tests est supérieur à 130. Le QI permet de comparer le fonctionnement intellectuel d’un enfant par rapport aux enfants du même âge.

Les enfants intellectuellement précoces (EIP) ont de grandes capacités dans certains domaines mais aussi un mode de pensée et une structure de raisonnement différents. C’est ce que confirme l’étude de Fanny Nusbaum dont les recherches ont conduit à une typologie de ceux qu’elle nomme les « philo-cognitifs ».

Ils représentent environ 2,2 % de la population. Ce constat chiffré synonyme de capacités supérieures, appréhendées de manières différentes selon les individus et leur environnement, s’accompagne de multiples symptômes souvent handicapants, qui les fragilisent.

Des appellations complémentaires :

intellectuellement précoces : ils développent plus tôt que les autres des facultés intellectuelles très supérieures à la moyenne. En ce sens, ils constituent une véritable richesse pour la société.

Cependant, cette supériorité cognitive, seule mesurée par les tests, s’accompagne très souvent de déficit au niveau de la sphère affective et de la sphère relationnelle.

haut potentiel : les facultés confirmées par les tests ne sont que potentielles et l’individu doit les faire émerger pour pouvoir les partager.

philo-cognitif : leur besoin de penser et de s’interroger se caractérise par un triple processus :  « un raisonnement actif et compulsif, une sensibilité et une alerte exacerbées, et une pensée automatique et analog

De multiples facettes

Le potentiel cognitif se caractérise par un fonctionnement différent dans le traitement de l’information qui rend l’enfant particulièrement performant dans certains domaines.

Mais ce formidable atout s’accompagne de déficits qui rendent le quotidien parfois difficile. Ils traitent par exemple plusieurs informations en même temps, mais ne savent pas prioriser.

Leur raisonnement global ne peut composer avec le raisonnement séquentiel de la majorité des individus. Ils vont très vite dans leur tête, parfois trop.

Ce fonctionnement se traduit par des différences entre enfant précoce et enfant scolaire.

ENFANT SCOLAIRE ENFANT PRÉCOCE
Est intéressé Est très curieux mais structure difficilement ses connaissances
Ecoute avec intérêt Fait montre d’opinions mais n’est pas toujours tolérant
Connaît les réponses Pose des questions mais est parfois hors sujet
A de bonnes idées A des idées folles et plus
Répond aux questions Discute les détails et cherche les limites
Apprend facilement Sait déjà parfois sans pouvoir expliquer le raisonnement
Comprend les idées Conçoit les abstractions mais le concret peut lui échapper
Comprend le sens Tire des conclusions qu’il peut utiliser en hypothèse
Aime ses pairs Préfère les adultes mais rencontre des difficultés relationnelles
Aime l’école Aime apprendre mais redoute l’échec

– Certains ont une pensée en «arborescence» (un mot peut engendrer de nombreuses questions dont les réponses en appellent d’autres), d’autres en «archipel» (ils enregistrent de nombreuses informations mais ne font pas de liens). Cette différence a été mise en évidence par les derniers travaux de Fanny Nusbaum, Dominique Sappey-Marinier et Olivier Revol On constate une combinaison de caractéristiques bien différentes selon les individus :

– On distingue les intuitifs pour qui les réponses sont une évidence (qu’ils n’expliquent pas) et les déductifs qui envisagent toutes les possibilités (au risque de ne pouvoir choisir la bonne et de perdre du temps). Ces 2 profils ne se comprennent pas.

Ce sont des enfants fascinants d’autant que leurs capacités langagières, très développées parfois, les rapprochent des adultes. C’est pourquoi très tôt ils prennent le pouvoir sur leur environnement, mais sans paradoxalement l’assumer. Et comme le dit Olivier REVOL (pédopsychiatre): «L’enfant à haut potentiel n’est pas tout à fait comme les autres, mais comme les autres c’est un enfant». En ce sens ils ont besoin d’un cadre dont ils testent en permanence la solidité, au risque de se mettre en danger.

Certains enfants (et des adultes) à haut potentiel expriment souvent un mal-être, identifié ou non, né de l’écart entre le potentiel cognitif et la capacité à gérer les affects, émotionnels et relationnels.

Les enfants à haut potentiel sont ainsi souvent hypersensibles, mais avec une empathie réduite. Ils n’ont pas de filtres : ils n’intègrent pas les codes, reçoivent et émettent de manière brute, amplifient les messages. Ils n’ont pas de limites, sont excessifs parfois. Ces comportements sont déstabilisants pour les autres, vertigineux pour eux. Ce sont de véritables funambules en recherche d’équilibre permanent.

Ayant ressenti très tôt leur différence, ils ont pu installer des barrières, des défenses et parfois même construire un «faux-self» correspondant à ce qu’ils croyaient qu’on attendait d’eux. Ce difficile positionnement, qui conduit même certains à s’inscrire dans le projet d’autrui, complique les relations avec l’environnement.

La précocité intellectuelle est en fait un amplificateur de toutes les caractéristiques qu’elle induit. Il est donc primordial d’accompagner l’enfant dès son plus jeune âge, et particulièrement dans le cadre scolaire, part importante de la vie d’un enfant.

Fanny Nusbaum distingue 2 types de philo-cognitifs : les philo-complexes et les philo laminaires présentant des caractéristiques et des comportements bien spécifiques, succinctement reportées dans le tableau ci-dessous :

Extrait du livre de Fanny Nusbaum « Les philo-cognitifs » p.181

Place de l‘école – Place à l’école

Les besoins des EIP ne sont pas leurs envies ou désirs

Cantonner les enfants à haut potentiel dans leurs domaines d’excellence ne serait pas aidant. Tout en leur offrant les opportunités d’exprimer leurs talents, la démarche d’accompagnement doit viser l’harmonie dans le développement.

Sur le plan scolaire, les manifestations de la précocité sont différentes selon les individus et leur lecture de l’environnement. Ils peuvent être en réussite ou, paradoxalement, en échec, adaptés, voire sur-adaptés, ou rebelles.

Ecole / élève : chacun sa part

Prendre en compte leur précocité intellectuelle c’est pour l’école :

  • les solliciter et stimuler leur créativité
  • les confronter à la complexité et maintenir le sens de l’effort
  • entretenir leur plaisir d’apprendre
  • les encourager dans les domaines pour lesquels ils sont le moins performants
  • instaurer un cadre solide et bienveillant
  • impliquer son environnement proche

Pour faire émerger son potentiel, l’enfant intellectuellement précoce doit :

  • Comprendre et accepter sa précocité.
  • Gérer ses paradoxes et se repositionner
  • Rétablir l’équilibre entre les composantes de son intelligence.
  • Viser l’harmonie dans le développement en évitant de se limiter aux domaines d’excellence.
  • Connaître autrui et appréhender avec bienveillance la complémentarité des 2 fonctionnements (global, le leur, et séquentiel, celui de la grande majorité de non précoces)

La démarche doit être accompagnée. Elle se fait sur la durée, dans un environnement adapté qui aide les enfants mais aussi les parents.

C’est tout l’enjeu de l’EDEIP.

Importance d’une école dédiée

Regrouper ces enfants présente, pour eux, un double avantage :

PSYCHOLOGIQUE ET SOCIAL D’UNE PART :

Ils communiquent avec des individus qu’ils reconnaissent comme semblables. Ils se reconnaissent et s’attirent. Ils sortent ainsi de leur éventuel isolement (qu’ils se sentent exclus ou qu’ils s’excluent eux-mêmes).

Toute personne se construit d’une part en s’identifiant à un ou des pairs, d’autre part à travers l’écho renvoyé par autrui. La réduction du décalage favorise la réussite, mais suppose qu’il y ait confrontation à autrui.

PÉDAGOGIQUE D’AUTRE PART :

Les différents niveaux par module permettent aux enfants de se rapprocher de personnes plus âgées ou de s’épanouir avec des plus jeunes selon les activités.

L’individualisation des approches favorise l’adaptation au rythme de chacun, et le meilleur accompagnement.